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Les “sentinelles” vertes de la F3C

Publié le 22/12/2020

Depuis le début de l’année, la Fédération Communication, Conseil, Culture travaille à la mise en place des “Sentinelles vertes”. Objectif : créer, dans les entreprises, un réseau d’experts sur les questions de développement durable, porter plus loin les revendications et les actions… et susciter de nouvelles vocations.

Audrey Kamga est toute jeune élue au comité social et économique (CSE) d’Arte France. Bruno Colladant, apiculteur à ses heures, est représentant de proximité dans un site du groupe Orange, à la direction technique du système d’information. Philippe Ballester est élu chez CBA Informatique Libérale, un éditeur de logiciels basé à Avignon qui emploie 150 salariés. A priori, peu de similitudes entre ces trois délégués syndicaux… Pourtant, tous ont choisi de rejoindre le réseau des Sentinelles vertes, lancé en mars dernier par la Fédération Communication, Conseil, Culture (F3C). Ce groupe a l’ambition de réunir des « personnes motivées par les questions environnementales et de s’appuyer sur elles pour être des relais actifs au sein des entreprises, afin de faire avancer les choses », résume Michaël Pinault, le secrétaire fédéral à l’initiative du projet. Le réseau compte déjà une quarantaine de Sentinelles et en espère une centaine dès l’année prochaine.

La concrétisation des valeurs du développement durable

Aller au-delà des discours et faire bouger les lignes, c’est ce qui a séduit Audrey. « Le développement durable et la responsabilité sociétale des entreprises restent trop souvent des vœux pieux. Il faut trouver les moyens de les traduire concrètement », explique l’énergique jeune femme qui a par exemple profité de sa rencontre avec Bruno Patino, le nouveau président de la chaîne de télé franco-allemande, nommé en juillet, pour « parler des priorités, notamment en matière de RSE ». La négociation, au début de 2021, du contrat d’objectifs et de moyens pourrait ainsi acter d’une proposition de compenser l’empreinte carbone des tournages à l’étranger par des versements à des associations.

Pour Philippe et Bruno, militants et « pratiquants » convaincus depuis des années, s’engager dans le réseau était une évidence – afin que les questions de transition écologique soient davantage portées et défendues, mais pas seulement. « Le syndicalisme a été et reste un outil de transformation sociale ; aujourd’hui, il doit devenir incontournable face à l’urgence climatique », résume Bruno.

Le chantier est vaste. Il faut d’abord sensibiliser les salariés et « user de pédagogie pour faire évoluer les pratiques. Ne serait-ce que dans l’utilisation et la gestion des mails (envoi, stockage…) ou au sujet des usages numériques. Il existe des pratiques moins énergivores que d’autres – par exemple télécharger un programme plutôt que de le regarder en streaming –, qu’il faut faire connaître », indique Audrey. Même préoccupation pour l’équipe CFDT d’Orange, qui a décidé d’organiser des heures mensuelles d’information syndicale concernant « l’urgence climatique et le Pacte du pouvoir de vivre », explique Bruno, qui souhaite aller encore plus loin dans la sensibilisation des salariés en s’appuyant sur la mise en place, par l’entreprise, d’ateliers « fresque du climat » et « fresque du numérique »1.

Un nouveau réseau d’appui à la négociation

Le CSE, instance dans laquelle les trois Sentinelles sont impliquées, est également un niveau essentiel pour « engager des projets en lien avec le développement durable », explique Philippe, qui veille à toujours favoriser les mobilités durables : mise en place d’un dispositif de covoiturage bénéficiant aux salariés et recours systématique aux « transports groupés dès que l’on organise une sortie ou un événement ». Le CSE est aussi le lieu « pour réfléchir à des actions concrètes à mettre en œuvre dans notre action syndicale », indique Bruno, qui se réjouit d’avoir pu, lors de la dernière campagne électorale, apporter une « petite avancée dans la réduction du papier, grâce au lancement de l’application mobile CFDT Orange. Cela a notamment permis de réduire nettement le nombre de tracts et de fascicules distribués ». Prochaine étape : pousser la réflexion sur l’impact en production de CO2 des goodies distribués lors des campagnes.

L’ambition du réseau des Sentinelles, c’est de peser, autant que possible, dans les politiques RSE des entreprises et de soutenir la négociation d’accords. Compte tenu de la complexité des sujets, l’appui du réseau ne peut être que bienvenu quand il s’agira d’« épauler les négociateurs dans les entreprises et leur offrir une analyse pointue des enjeux climatiques », indique Bruno. « Début 2021, nous allons devoir négocier un nouveau plan de mobilité chez Orange. S’appuyer sur le réseau des Sentinelles sera incontestablement un plus. De même que nous pourrons ensuite aider d’autres négociateurs ayant à discuter un tel plan dans leur entreprise. »

Un catalyseur de vocations pour jeunes syndicalistes

En montrant l’implication et l’action de la CFDT sur ces questions de développement durable, le réseau devrait séduire de nouveaux adhérents. « Il peut être un formidable catalyseur à de nouvelles vocations, pour faire venir au syndicalisme des personnes qui ont la fibre et prennent le relais », souhaite Philippe. L’enjeu est central car, comme le craint Michaël, « si nous ne sommes pas assez offensifs sur ces sujets, le risque est que des jeunes dans les entreprises se détournent des organisations syndicales traditionnelles et aillent voir ailleurs ».

epirat@cfdt.fr 

1. La « fresque du climat » est un outil de formation qui permet d’assimiler les principaux mécanismes du réchauffement climatique et ses problématiques. La « fresque du numérique » a le même rôle pour les enjeux du numérique. Enfin, la F3C propose des formations à la « fresque du climat ».