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Les succès du pôle pigistes CFDT

Publié le 31/12/2020

Depuis plusieurs années, le pôle pigistes de la Fédération Communication, Conseil, culture (F3C) de la CFDT agit pour défendre les droits de ces travailleurs précaires de l’information. Mais aussi pour structurer un réseau d’échanges et d’entraide. Avec succès.

La bataille aura duré près de trois ans. Le motif ? Obtenir l’égalité des droits entre journalistes pigistes – ces précaires de l’information payés à la ligne, au feuillet ou à la prestation* – et les autres salariés en matière de calcul des indemnités journalières, qu’il s’agisse d’arrêt maladie, de congé maternité ou paternité, voire de pension d’invalidité. « Cette discrimination est en passe d’être levée », savoure Élise Descamps, l’énergique coordinatrice du pôle pigistes de la CFDT-Journalistes, qui voit là aboutir un intense travail de mobilisation et de lobbying. « Parce que nous sommes rémunérés au travail rendu et non selon un nombre d’heures travaillées, on se voyait appliquer une règle de calcul différente, beaucoup moins favorable. Pour avoir droit aux indemnités journalières, nous devions par exemple avoir cotisé sur la base d’un salaire d’au moins 20 360 euros annuels, soit nettement plus que les autres salariés rémunérés au Smic », explique la jeune femme, elle-même pigiste depuis seize ans, notamment pour La Croix, et qui coordonne le pôle pigistes depuis cinq ans.

Structures CFDT coordonnées

La CFDT-Journalistes n’a certes pas été seule à la manœuvre afin d’obtenir de la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, l’annonce d’un arrêté modifiant les conditions d’ouverture de droits des pigistes, au début octobre. Mais elle y a fortement contribué, soutenant dans le même temps des adhérentes pigistes ayant porté ce combat devant la justice, et allant jusqu’à saisir le Défenseur des droits. Dans son combat, le pôle pigistes a d’ailleurs pu compter sur l’appui d’autres forces de la CFDT, entre autres des militants de la CFDT-Artistes-auteurs (habitués des problématiques de protection sociale) ou des militants de la Fédération Protection sociale, Travail, Emploi (CFDT-PSTE).

Rompre l’isolement

Cette victoire est donc avant tout celle d’un collectif, qui œuvre depuis plusieurs années pour soutenir les pigistes et défendre leurs droits, mais aussi créer un réseau d’entraide. « J’essaie de faire du lien », poursuit Élise, qui alimente régulièrement le site internet dont la baseline résume parfaitement les objectifs : « Des infos, des expériences, pour plus de solidarité ». Précaires devant souvent jongler entre plusieurs employeurs, les pigistes sont souvent isolés. « Ils sont rarement rattachés à des sections d’entreprise », note Élise. Aussi, pour faire face aux tracasseries et obtenir le paiement de leurs piges ou toucher leurs allocations lorsque leurs collaborations cessent, mieux vaut connaître ses droits et être accompagné. Le pôle pigistes leur offre cette aide, avec la possibilité de bénéficier de réponses en ligne et d’accéder à des espaces de discussion. Pour partager leurs galères, des conseils, des idées mais aussi de bonnes nouvelles : négociation de chèques-vacances bénéficiant aux pigistes chez Malesherbes Publications, négociations annuelles obligatoires (NAO) fructueuses intégrant les pigistes chez Bayard…

Revenu solidaire de soutien

Ce réseau a été particulièrement actif et précieux pendant le confinement, période ô combien délicate voire dramatique pour certains pigistes confrontés au gel ou à l’annulation de leurs commandes et collaborations. Le collectif a alors pesé pour obtenir un accès des pigistes au dispositif de chômage partiel. Des échanges nourris entre les membres du pôle et la CFDT-Journalistes ont également permis des avancées, reconnaît Renaud Dalmar, délégué syndical central CFDT à Radio France : « Il y a eu beaucoup d’échanges entre élus CFDT, notamment entre élus de l’audiovisuel public et privé. » La décision du groupe Radio France d’adopter des mesures de solidarité en faveur de ses pigistes a fait tache d’huile. Rebecca Martin, élue CFDT au CSE du groupe France Médias Monde (France 24, RFI, Monte Carlo Doualiya), a ainsi proposé d’en reprendre le principe pour les pigistes du groupe. Ce qui n’est pas anecdotique quand on sait qu’ils représentent 40 % de la masse salariale. La direction n’a pas tergiversé et a acté le versement d’un « revenu solidaire de soutien » (calculé sur la moyenne des piges mensuelles effectuées en 2019) en faveur des pigistes touchés par la baisse d’activité due à la Covid-19. « De la mi-mars à la mi-juillet, il a permis d’assurer un revenu à plus de 500 pigistes du groupe », indique l’élue CFDT. Les absences de pigistes pour Covid ou garde d’enfants ont également été prises en charge. Et si, depuis août, le revenu solidaire a été suspendu, « on reste vigilant car de nombreux pigistes constatent une baisse sensible de leur activité, en partie due à la réorganisation post-Covid ».

D’autres batailles à mener

Afin de limiter la précarité dans la profession, nombre de batailles restent à mener, estime le pôle pigistes. La CFDT travaille d’ailleurs sur les tarifs des piges web, parfois très bas, en vue de demander une négociation avec les éditeurs de presse en ligne et ainsi obtenir des barèmes minimaux, comme cela se pratique dans les branches de la presse (presse magazine, presse spécialisée, etc.). Affaire à suivre…

epirat@cfdt.fr 

* Puisque l’on retrouve parmi les pigistes des journalistes mais aussi des techniciens (à la radio, par exemple).