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Les nouvelles règles de l’activité partielle dévoilées

Publié le 26/06/2020

Le 24 juin, l’exécutif recevait de nouveau les partenaires sociaux. Malgré un ordre du jour copieux, l’activité partielle a concentré l’essentiel de la réunion. 

Le "cap" fixé par l’exécutif pour relancer l’économie était jusque-là resté assez flou. Au fil des rencontres avec les partenaires sociaux, on commence à y voir un peu plus clair, même si les éléments restent distillés au compte-goutte. Après l’apprentissage début juin, et en attendant les mesures pour l’emploi des jeunes dans les prochains jours, Emmanuel Macron a présenté le 24 juin aux partenaires sociaux les contours de l’activité partielle nouvelle formule, qui devrait voir cohabiter deux dispositifs. Le premier, dit de droit commun, est celui que connaissent salariés et entreprises depuis le début de la crise. Modifié à plusieurs reprises (le dernier changement date du 1er juin), il devrait être stabilisé au 1er octobre. « L’activité partielle sera plus protectrice qu’avant la crise, couvrant les salaires jusqu’à 4,5 smic, indemnisant les salariés au smic à 100% et assurant un financement mutualisé de la formation professionnelle des salariés, au moins à hauteur de 70% des coûts pédagogique », résume l’Elysée dans le document transmis aux partenaires sociaux.

Un travail de réflexion commun

Dans un courrier commun adressé à Emmanuel Macron, CFDT, CFTC, CFE-CGC, Unsa côté syndical et CPME, FNSEA, Medef et U2P côté patronal choisissent d’engager un travail de réflexion en vue de construire des réponses concrètes à la crise. Convaincus que « quatre mois d’urgence sanitaire n’ont pu ruiner les fondamentaux de notre économie ni mettre à bas notre système de solidarité », ils estiment que le redémarrage de l’économie nécessite « des actions de relance économique et sociale », dont le plan de soutien devra innover pour réussir. Lucides sur la situation de l’emploi, et le fait que les circonstances ne permettront pas de les sauver tous par l’activité, ils appellent à « favoriser le dialogue économique et social dans les branches, les territoires et les entreprises, pour développer un travail de qualité ». Sans nier leurs divergences, mais avec un réel souci de responsabilité partagée, les signataires estiment avoir un rôle à jouer dans l’intérêt général. « Nous avons des réflexions à partager, des idées à échanger et confronter, des propositions à débattre, des solutions à construire. C’est ainsi que nous contribuerons ensemble à la sortie de crise efficace et juste dont notre société a besoin ».

Dans les faits, l’indemnité versée aux salariés passera au 1er octobre de 70% à 60% du salaire brut (soit 72% du net contre 84%) et ce pour une durée de trois mois, renouvelable une fois. L’allocation versée à l’employeur passera elle aussi à 60% (contre 100% fin mars et 85% depuis le 1er juin). « C’est une manière de ne pas laisser les entreprises s’installer avec des aides publiques en permanence, a réagi Laurent Berger, qui se félicite qu’ait été introduit un engagement de maintien dans l’emploi durant la période d’activité partielle ».

Les entreprises et les secteurs qui verraient leur activité perturbée sur le long terme préféreront sans doute se tourner vers l’activité partielle de longue durée qui entre en vigueur au 1er juillet, et dont le niveau d’indemnisation sont ceux appliqués jusqu’à présent pour l’activité partielle de droit commun (84% du salaire net pour le salarié, et un reste à charge de 15% pour l’employeur, puis 20% à compter du 1er octobre). Accessible uniquement par accord d’entreprise ou de branche, bâti sur la base d’un diagnostic et d’une prévision de l’activité, le dispositif vise à « préserver les compétences et les emplois » et ainsi éviter des « vagues de licenciements ». Et l’idée d’un accord type sur l’APLD pour les petites entreprises, avancée au cours la rencontre par la CFDT, a été retenue. Elle pourrait prendre la forme d’un ANI qu’il reste à négocier rapidement.

Ce faisant, l’exécutif fait, peut-être pour la première fois depuis longtemps, le pari du dialogue social. Et Laurent Berger de s’en féliciter. « C’est un bon système aussi parce qu’il est conditionné à un accord. Cela fait un mois qu’on y travaille et on a été écoutés ». Ces accords devront notamment permettre de débattre des engagements des entreprises en termes de maintien dans l’emploi. L’avancée est notable.

Un effort de méthode

Au-delà de l’activité partielle, l’idée d’une mobilisation collective pour l’emploi fait son chemin. L’exécutif, dans son document officiel, appelle à « une nouvelle donne sociale plaçant l’emploi au rang de première priorité, dans le cadre d’un projet de société conciliant performance économique, justice sociale et transition écologique ». Les partenaires sociaux, dans leur grande majorité, y sont prêts, comme en témoigne le courrier commun envoyé la veille de la rencontre au président de la République et signé par huit organisations (lire ci-contre).  Mais sur les sujets qui s’annoncent, en particulier celui de l’assurance chômage, la CFDT demande un effort de méthode et de loyauté. « Il serait dommageable d’annoncer aujourd’hui une mobilisation partagée sur les enjeux d’emploi pour fracasser cet engagement commun sur le mur de l’assurance chômage », assure Laurent Berger, qui souhaite des garanties sur la manière dont va se passer la concertation sur ce sujet.

Depuis plusieurs semaines, l’exécutif souffle le chaud et le froid sur un possible abandon de la réforme. Plusieurs de ses mesures ont été suspendues, mais aucune n’est pour l’heure abrogée. Et la règle des six mois de travail nécessaire pour l’ouverture ou le rechargement des droits (appliquée depuis le 1er avril) est toujours en vigueur. Ce que Laurent Berger décrivait il y quelques mois encore comme une « tuerie » pour les demandeurs d’emplois concernés est devenu « totalement inapplicable dans la situation économique et sociale actuelle ! Dans ses dernières prévisions, l’Unedic estime que 630 000 demandeurs d’emplois supplémentaires devront être indemnisés fin 2020. On ne veut pas découvrir fin juillet des mesures qui n’auront pas été discutées avant ! » prévient la CFDT.

aballe@cfdt.fr