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Clause de non-concurrence : sa violation par le salarié lui fait perdre définitivement le droit à contrepartie financière

Publié le 07/02/2024

Dans un arrêt du 24 janvier 2024, la Cour de cassation se penche sur le cas d’un salarié ne respectant pas, temporairement, son obligation de non-concurrence à la suite de la rupture de son contrat. Elle rapelle que cette violation prive le salarié du bénéfice de la contrepartie financière, et cela même si le manquement a cessé. Cass.soc. 24.01.24, n°22-20.926.

La violation temporaire d’une clause de non-concurrence

Dans cette affaire, le contrat de travail d'un salarié cadre contenait une clause de non-concurrence. Celle-ci prévoyait une obligation de non-concurrence d’une durée de 24 mois à compter de la rupture du contrat.

La clause de non-concurrence vise à interdire à un salarié d’exercer une activité professionnelle concurrente à son ancien employeur, pendant une certaine durée après la rupture du contrat. Le tout dans un espace géographique limité.
Elle est soumise au respect de conditions cumulatives(1) que le juge se doit de vérifier.
Ainsi doit-elle :
- être indispensable à la protection des intérêts de l’entreprise ;
- être limitée dans le temps et dans l’espace ;
- tenir compte des spécificités de l’emploi du salarié ;
- comporter l’obligation, pour l’employeur de verser une contrepartie financière au salarié.

Un mois après avoir démissionné de l’entreprise, le salarié s’engage dans les mêmes fonctions auprès d’une société concurrente. Poste qu’il n’occupe que durant 6 mois.

Apprenant cette violation, son ex-employeur cesse de lui verser la contrepartie financière et saisit le conseil de prud’hommes pour obtenir le remboursement des sommes déjà versées. Le salarié sollicite quant à lui le paiement de cette contrepartie pour la durée restante d’application de la clause.

Cette contrepartie financière a pour objet « d’indemniser le salarié tenu, après rupture du contrat de travail, d'une obligation limitant ses possibilités d'exercer un autre emploi (2) ». Elle est due pour le salarié qui respecte l’obligation de non-concurrence.

Elle n’est donc pas due par l’employeur dès lors que le salarié ne respecte pas l’interdiction de concurrence (3). Il peut néanmoins percevoir l’indemnité pour la période antérieure à la violation de la clause (4), c’est-à-dire pour la durée où il l’a respectée.

La cour d’appel fait droit à cette demande du salarié. Elle considère que l’obligation de non-concurrence n’ayant pas été respectée pendant 6 mois, la contrepartie devait être versée pour les 18 mois restants.  

Cela conduit l’employeur à former un pourvoi en cassation.

La perte définitive du bénéfice de la contrepartie financière

Dans son arrêt du 24 janvier, la Chambre sociale donne raison à l’employeur.

Selon elle, « La violation de la clause de non-concurrence ne permet plus au salarié de prétendre au bénéfice de la contrepartie financière de cette clause même après la cessation de sa violation. »

La cour d’appel ne pouvait donc pas arriver à une telle solution. Dès lors qu’elle a constaté que le salarié avait violé la clause, elle devait en conclure qu’il avait définitivement perdu le bénéfice de la contrepartie financière. Peu important que la violation ait ensuite cessé.

En l’espèce, le salarié avait perdu son droit à la contrepartie financière dès son engagement auprès de la nouvelle société.

Cette solution n’est pas étonnante, les juges ayant déjà abouti pour la première fois à cette conclusion il y a longtemps (5), et l’avaient confirmé par la suite. Un salarié doit donc veiller à bien respecter la clause de non-concurrence de son précédent contrat s’il souhaite bénéficier de la contrepartie financière. Dans le cas contraire ce droit serait définitivement perdu.

 

 

(1) Cass.soc. 10.07.02, n°99-43.334 ; Cass.soc. 29.01.03, n°00-44.882.

(2) Cass.soc. 15.01.14, n°12-19.472.

(3) Cass.soc. 05.05.04, n°01-46.261.

(4) Cass.soc. 18.02.03, n°01-40.194.

(5) Cass.soc. 31.03.93, n°88-43.820.

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