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Action Juridique 250 : la gestion algorithmique des travailleurs (presque) pour les nuls !

Publié le 22/06/2022

Notre numéro d’été s’attaque à un sujet qui n’est pas des plus simples ! Pour autant c’est un vrai sujet, dans une société qui se digitalise à tous les étages. Avec la généralisation du télétravail, la crise sanitaire nous a collectivement fait prendre conscience à quel point nos données stockées et analysées par des algorithmes régentait notre vie au travail. Il était donc temps de faire le point sur les conséquences de cette amplification. Des enjeux nouveaux pour nous tous en tant que travailleurs comme en tant que syndicalistes !

Etre mieux informé pour mieux se protéger des dérives potentielles

Si bien des ouvrages spécialisés traitent des phénomènes de plateformes ou de télétravail, peu s’intéressent frontalement à l’emprise des algorithmes sur les travailleurs. Problématique pourtant ô combien cruciale quant au respect de leurs libertés tandis qu’ils effectuent leurs tâches sous une forme de contrôle qui analyse leurs données en temps réel !

Face à cet écueil, ce numéro d’Action juridique vous propose dès son introduction de démystifier en le déchiffrant au mieux le jargon d’informaticiens qui peut inquiéter... C’est l’objet d’une introduction générale faisant le point sur les différents concepts et leurs appellations.

Le but ? Vous permettre de vous approprier les voies de droit pour recouvrer une liberté d’action dans l’entreprise, mais aussi en cas de contentieux.

Trop souvent méconnues des travailleurs, et même souvent des militants, ces voies de droit s’incarnent principalement dans l’application du Règlement général à la protection des données (RGPD). L’application de ce texte de références soulève bien des interrogations auxquelles ce numéro ambitionne d’apporter des réponses…

  • Peut-on contrôler les travailleurs via des systèmes informatiques ?
  • De quelle manière et à quelles fins : pour surveiller ou évaluer ?
  • Quelles conséquences sur leurs conditions de travail et sur leurs droits et libertés fondamentales ?
  • Quels sont la place et le rôle des IRP dans ces délicates problématiques ?

De nouveaux moyens de contrôler les travailleurs, mais sous régime juridique plus contraignant !

A ce stade, il est nécessaire de réinterroger le traditionnel lien de subordination de l’employeur vis-à- vis des salariés en le mettant à jour, notamment en l’assortissant de nouvelles exigences lorsqu’il l’exerce aux moyens de systèmes algorithmiques et de données. Cette méthode implique en effet pour lui un régime de contrôle des travailleurs ne pouvant être licite que si le traitement algorithmique est transparent et proportionné.

Régime qui suppose également de faire l’inventaire des droits à la protection des données personnelles du travailleur.

Ces mécanismes de défense des droits des travailleurs sont analysés dans la première partie du dossier : les données et l’algorithme comme outil de gestion RH.

Quels sont les droits dont jouissent les travailleurs leur permettant de se réapproprier leurs données personnelles ? Il s’agit du droit d’accès à ses données personnelles, mais aussi du droit d’opposition ou de rectification à celles-ci.

Ces droits permettent entre autres de conférer aux personnes le pouvoir d’en prendre connaissance et, le cas échéant de demander une modification à l’employeur. Ils permettent aussi de se réapproprier du « pouvoir d’agir » dans l’entreprise, lorsque le travail et son évaluation sont contrôlés par des machines algorithmiques.

Ils offrent également au travailleur, dans une certaine mesure, une capacité de résistance au pouvoir de direction, de contrôle et de sanction de l’employeur lorsqu’il l’exerce par le biais d’algorithmes informatiques en mobilisant le droit d’opposition, d’effacement et le droit de refuser, ou a minima, de contester la prise de décision automatisée.

Le dialogue social peut - et surtout doit - s’inviter dans ces bouleversements du rapport au travail !

Au-delà du nécessaire droit de regard des élus sur le déploiement de technologies algorithmes impactant les salariés, nous choisissons de faire la part belle à ce qui peut être négocié dans la seconde partie du dossier.

Il s’agit non seulement d’un droit de regard des élus, mais aussi de la négociation d’accords collectifs d’entreprises ou de branches. Le but étant d’anticiper et d’accompagner les changements induits par l’utilisation de ces technologies sur les conditions de travail et d’emploi : de bien vastes chantiers revendicatifs !

En fin de dossier, nous vous dévoilons le projet de directive européenne visant à réguler la gestion algorithmique des plateformes de travail : de quoi alimenter utilement les futurs cahiers revendicatifs pour des catégories de travailleurs qui en ont particulièrement besoin !

En plus du dossier…

Une « actu » dans les rubriques annexes propose d’exposer comment et pourquoi le RGPD s’impose aussi aux organisations syndicales. Il annonce la sortie prochaine d’un guide de la Cnil adapté aux contraintes des OS, à leurs spécificités et difficultés propres. L’interview de la déléguée à la protection des données (DPO) de la Confédération conclut cet article.

Et notre désormais rituel rendez-vous « Le coin du militant prud’homme » s’attache à décortiquer les différents cas de figure des délais spécifiques aux licenciements disciplinaires.

Bien, gageons que des sujets aussi sérieux ne feront pas forcément de bonnes lectures de plage, mais vous seront utiles dans vos permanences !

Prochain sujet : maladie et contrat de travail.

Bel et bon été à toutes et tous d’ici là !