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Négociation collective : l’accord majoritaire généralisé depuis le 1er mai

Publié le 02/05/2018

La généralisation progressive du principe de l’accord majoritaire, initiée par la loi Travail en 2016, touche à sa fin. Jusqu’ici réservé à certains accords collectifs, ce principe est, depuis le 1er mai 2018, applicable à tous les accords d’entreprise. Compte tenu de la place accrue dévolue à la négociation collective d’entreprise, renforcée par l’ordonnance du 22 septembre 2017, cette échéance, initialement fixée au 1er septembre 2019, était très attendue!

  • Le principe de l’accord majoritaire

Le principe s’applique à tous les accords d’entreprise, d’établissement, de groupe et interentreprises.

Désormais, pour être valables les accords d’entreprise doivent être signés par une ou plusieurs organisation(s) syndicale(s) représentative(s) ayant obtenu plus de 50% des suffrages exprimés en faveur d'organisations représentatives au 1er tour des dernières élections professionnelles et ce, quel que soit le nombre de votants (1).

A défaut d’avoir recueilli la majorité, le ou les syndicats minoritaire(s) qui auront recueilli plus de 30% des suffrages peuvent toutefois faire valider l’accord signé par un vote majoritaire des salariés de l’entreprise. Faute d’avoir obtenu plus de 30%, aucun accord ne pourra être validé.

De quelles élections s’agit-il ? 
- Si le comité social et économique (CSE) n’a pas encore été mis en place, il s’agit des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise (CE) ou de la délégation unique du personnel (DUP) ou, à défaut, des délégués du personnel (DP), quel que soit le nombre de votants.
- Si  le CSE a été mis en place, il s’agit des dernières élections des titulaires au comité social et économique (CSE).

  • A quels accords s’applique le principe majoritaire ?

Pour rappel, la loi Travail du 8 août 2016 avait déjà, tout en élargissant le champ de la négociation d’entreprise, soumis certains accords à la règle majoritaire. Toutefois, pour permettre aux employeurs et aux OS de s’approprier la réforme sans risquer de paralyser le dialogue social, la loi avait échelonné son entrée en vigueur selon les thèmes abordés par l’accord :
- les accords de préservation de l’emploi  depuis août 2016,
- les accords sur la durée du travail et les congés depuis le 1er janvier 2017,
- pour tous les autres accords la généralisation du principe était fixée au 1er septembre 2019 !
Pourtant, entre la primauté de l’accord d’entreprise et l’augmentation du nombre de sujets sur lesquels l’entreprise prime désormais et ce, depuis le lendemain de l’entrée en vigueur de l’ordonnance, il était indispensable d’accélérer la légitimation des accords. C’est pourquoi l’ordonnance du 22 septembre 2017(2) a avancé au 1er mai 2018, la généralisation du principe majoritaire.

Depuis le 1er mai 2018, la règle majoritaire vaut désormais pour tous les accords d’entreprise :

Par exemple les accords portant sur les primes, l’indemnité de fin de contrat, la qualité de vie au travail, la gestion des emplois et des parcours professionnels, la formation professionnelle, etc
Sont aussi concernés la plupart des accords de dialogue social portant sur :
       - la durée des mandats des membres du CSE,
       - le déplafonnement des temps passés en réunion de préparation du CSE et ses commissions,
       - l’augmentation du budget des activités sociales et culturelles,
       - les modalités d’expertise (expertise en continu, augmentation des frais pris en charge, conditions d’intervention, etc.).

  • Certains accords demeurent soumis à des conditions de validité plus strictes 

Certains accords restent soumis à des règles spécifiques :

- L’accord PSE (Plan de sauvegarde de l’emploi) portant sur le contenu du PSE dans les grands licenciements économiques restent soumis à la règle de l’accord majoritaire stricte. L’accord doit être signé par une ou plusieurs OSR ayant recueilli au moins 50% des suffrages au 1er tour des dernières élections (sans possibilité de recourir à des accords à 30% soumis à consultation, ni de négocier avec des élus).

 - L’accord qui institue le Conseil d’entreprise (fusion du CSE et la fonction de négociation) est soumis à la règle de l’accord strictement majoritaire, soit à plus de 50% au 1er tour des dernières élections (sans possibilité d’accord à 30% soumis à consultation des salariés)(3).

- Certains accords de dialogue social sont soumis à l’accord strictement majoritaire, soit avoir recueilli plus de 50% des suffrages exprimés en faveur d’OSR au 1er tour des dernières élections professionnelles. Il s’agit des accords portant sur :
       - le nombre d’établissements distincts,
       - la reconnaissance d’une Unité économique et sociale, 
       - la mise en place des représentants de proximité (et moyens de fonctionnement),
       - la mise en place d’une commission CSSCT en dessous de 300 salariés,
       - la mise en place de commissions supplémentaires,
       - le nombre de réunions du CSE, 
       - le délai de consultation du CSE.

- Le protocole d’accord préélectoral (PAP) reste soumis aux règles complexes de l’unanimité ou de la double majorité en voix et en nombre d’organisations signataires selon les sujets de discussion.

La CFDT se satisfait de la pleine application du principe majoritaire qu'elle n'a cessé de revendiquer. Il est en effet le corollaire indispensable non seulement à l'élargissement du champ de la  négociation d’entreprise, mais aussi à la primauté désormais consacrée à ce niveau de négociation. La règle de la majorité est la garante de la légitimité de ces accords.

Il faut par ailleurs rappeler que ces accords bénéficient d’une « présomption de validité » et d’un délai de contestation devant le TGI réduit à 2 mois à compter de la notification aux OS (ayant constitué une section syndicale) et de la publication dans la base de données des accords à l’égard des salariés et des autres OS.

 Vous trouverez ici une fiche pratique sur "La validité des accords collectifs".

 



(1) Art L.2232-12 C.trav.
(2) L’art. 11 de l’ordonnance 2017-1385 du 22.09.17.
(3) Art L.2321-2 C.trav.