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Télétravail

Publié le 02/07/2021 (mis à jour le 31/07/2023)

Le télétravail désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication (Art. L.1222-9 C.trav.)

Le télétravail peut être sollicité comme forme d’organisation générale du travail ou pour répondre à des circonstances exceptionnelles.

La loi n’exclut aucun salarié du bénéfice du télétravail en principe. La seule limite étant que télétravailler suppose de pouvoir utiliser les technologies adéquates en dehors des locaux de l’employeur.

Est qualifié de télétravailleur, tout salarié de l’entreprise qui effectue, soit dès l’embauche, soit ultérieurement, du télétravail.

Le télétravail doit être volontaire : il doit avoir été accepté par le salarié.

RECOURS AU TÉLÉTRAVAIL

Mise en place

Cas ordinaire

Le télétravail peut être mis en place dans le cadre d’un accord collectif ou, à défaut, dans le cadre d’une charte élaborée par l’employeur après avis du CSE, s’il existe.

Il doit être précisé dans l’accord collectif ou la charte :

  • les conditions de passage en télétravail, en particulier en cas d’épisode de pollution, et les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail ;
  • les modalités d’acceptation par le salarié des conditions de mise en œuvre du télétravail ;
  • les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail ;
  • la détermination des plages horaires durant lesquelles l’employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail ;
  • les modalités d’accès des travailleurs handicapés à une organisation en télétravail.

En l’absence d’accord collectif ou de charte, l’employeur et le salarié formalisent leur accord de recourir au télétravail par tout moyen (pas nécessairement un écrit). Toutefois, tout salarié qui accède, d’un commun accord avec l’employeur, au télétravail régulier est informé par écrit des conditions de mobilisation et de mise en œuvre de cette forme de travail, en fonction du lieu d’exercice du télétravail.

En cas de circonstances exceptionnelles ou cas de force majeure

Par dérogation, en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, ou en cas de force majeure, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés.

La décision relève du pouvoir de direction de l’employeur, il ne s’agit pas d’une modification du contrat de travail. L’employeur peut donc mettre en place le télétravail sans accord collectif ou charte. L’employeur doit procéder à une information des salariés par tout moyen sur les modalités du télétravail.

Même si le télétravail ne fait pas partie des modes d’organisation du travail instaurés au sein d’une entreprise, l’employeur est tenu de proposer au salarié inapte un poste disponible en télétravail pour satisfaire aux préconisations du médecin du travail. Cette solution inédite et favorisant le maintien en emploi résulte d’un arrêt récent de la Cour de cassation (1).

Le télétravail « informel »

Lorsque le télétravail est effectué sans avoir été formalisé (dans le contrat, une charte, une convention), l’employeur ne peut revenir sur cet usage faute de clause de réversibilité lorsque le retour à l’entreprise bouleverserait l’organisation professionnelle et la vie personnelle du salarié concerné (2).

Mise en œuvre

Cas ordinaire

Le télétravail revêt un caractère volontaire de sorte que chacune des parties peut refuser.

Lorsque la demande émane de l’employeur, le salarié peut refuser, ce refus ne sera pas fautif et ne saurait constituer un motif de licenciement.

Lorsque la demande émane du salarié et porte sur un poste télétravaillable, l’employeur doit motiver son refus dans les conditions prévues par l’accord collectif ou, à défaut, par la charte. Une exigence similaire de motivation vaut en l’absence l’accord collectif ou de charte lorsque la demande émane d’un travailleur handicapé ou d’un proche aidant.

Lorsque télétravail n’est pas mis en place par accord collectif ou charte, l’employeur est invité à préciser les raisons de son refus.

En cas de circonstances exceptionnelles et cas de force majeure

Il s’agit d’une exception au principe du double volontariat, le télétravail peut ainsi être imposé sans l’accord des salariés.

La crise sanitaire liée à la COVID-19 a particulièrement mis en lumière l’étendue du pouvoir de l’employeur dans la prise de décision du recours au télétravail. Les protocoles sanitaires du 31 août 2020 et du 16 octobre 2020 incitaient au télétravail, celui du 29 octobre 2021 obligeait les employeurs à mettre en place le télétravail pour les postes télétravaillables.

Le protocole du 31 août 2020 a fait l’objet d’une contestation devant le Conseil d’Etat qui a estimé qu’un protocole est un ensemble de recommandations pour la déclinaison matérielle de l’obligation de sécurité de l’employeur. Ainsi, les protocoles sanitaires n’ont pas de valeur contraignante.

De même, le questions-réponses du Ministère du Travail du 10 novembre 2020 qui imposait aux employeurs de recourir au télétravail pour les postes télétravaillables n’a pas de valeur contraignante. Toutefois, l’article L. 4121-1 du Code du travail met à la charge de l’employeur une obligation générale de sécurité. Il doit mettre en œuvre toutes les mesures de prévention possibles.

En cas de circonstances exceptionnelles le télétravail peut être envisagé comme une mesure de prévention. Ainsi, la responsabilité de l’employeur pourrait être engagée sur le fondement de l’obligation de sécurité s’il n’a pas pris les mesures de prévention et que le salarié subit de ce fait un préjudice (contamination à la Covid-19).

Postes télétravaillables

S’agissant de l’identification des activités de l’entreprise pouvant faire l’objet de télétravail, l’ANI du 26 novembre 2020 précise que cela relève nécessairement de la responsabilité de l’employeur et de son pouvoir de direction. Mais il prévoit également que le dialogue social permet de repérer les activités pouvant être exercées en télétravail. Le CSE doit être consulté sur les décisions de l’employeur relatives à l’organisation du travail ayant un impact sur la marche générale de l’entreprise, dont les conditions de mise en œuvre et le périmètre du télétravail.

Fin du télétravail

Cas ordinaire 

Période d’adaptation

Cette période permet de s’assurer que le télétravail est compatible avec l‘organisation du travail et les compétences techniques du salarié. Pendant cette période chacune des parties peut mettre un terme au télétravail afin de revenir à l’organisation antérieure moyennant le respect d’un délai de prévenance préalablement défini soit par l’accord collectif, par la charte ou de gré à gré entre l’employeur et le salarié.

Réversibilité

Les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail doivent être prévues dans l’accord collectif ou la charte.

Les ANI opèrent une distinction selon que le télétravail a été convenu dès l’embauche ou en cours de contrat. Lorsque le télétravail ne fait pas partie des conditions d’embauche, l’employeur et le salarié peuvent, à l’initiative de l’un ou de l’autre, convenir par accord de mettre fin au télétravail. Les modalités de cette réversibilité sont établies par accord individuel et/ou collectif. Lorsque le télétravail fait partie des conditions d’embauche, le salarié peut ultérieurement postuler à tout emploi vacant, s’exerçant dans les locaux de l’entreprise et correspondant à sa qualification, il bénéficie alors d’une priorité d’accès à ce poste.

L’article L. 1222-10 du Code du travail prévoit que lorsque le salarié sollicite un retour dans l’entreprise, l’employeur doit lui donner priorité pour occuper ou reprendre un poste sans télétravail correspondant à sa qualification et à ses compétences professionnelles et porter à sa connaissance la disponibilité de tout poste de cette nature.

Ainsi, le télétravailleur bénéficie d’une priorité générale d’emploi au sein de l’entreprise, lorsqu’un poste est vacant, par rapport à l’embauche d’une personne tierce à l’entreprise.

En dehors de l’application d’une clause de réversibilité, l’employeur ne peut pas mettre fin au télétravail sans l’accord du salarié car cela constitue une modification de son contrat de travail qu’il peut refuser.

En cas de circonstances exceptionnelles ou cas de force majeure

Dans ce contexte, pour la CFDT au regard de l’ANI du 26 novembre 2020, les modalités de retour à l’entreprise devraient être définies dans le « plan de continuité d’activité ». Il est souhaitable que les partenaires sociaux ou à défaut l’employeur unilatéralement prévoient des règles claires afin d’anticiper ce retour à un mode de travail sans télétravail (délai de prévenance raisonnable, etc ).

RÉGIME DU TÉLÉTRAVAIL

Le télétravailleur bénéficie des mêmes droits individuels et collectifs que le salarié travaillant dans les locaux de l’entreprise.

Droits individuels

Temps de travail et respect de la vie privée

La durée du travail est identique que le salarié travaille sur site ou en télétravail. Les dispositions relatives aux durées maximales quotidiennes et hebdomadaires, au temps de repos, de pause et au décompte des heures de travail s’appliquent, ainsi que celles propres aux conventions de forfait en jour.

  • L’employeur doit contrôler la durée du travail du salarié.
  • L’employeur fixe, en concertation avec le salarié, les plages horaires durant lesquelles il peut le contacter, en cohérence avec les horaires de travail en vigueur dans l’entreprise.
  • La mise en place de dispositifs numériques de contrôle du temps de travail nécessite le respect de 2 conditions : la consultation préalable du CSE et l’information préalables des salariés.
  • La mise en place du télétravail prend en compte le droit à la déconnexion.
  • L’employeur est tenu d’organiser chaque année un entretien qui porte notamment sur les conditions d’activité du salarié et sa charge de travail.
  • L’usage des outils personnels du salarié ou fournis par l’employeur est encadré par l’employeur, auquel il incombe de prendre, les mesures nécessaires pour assurer la protection des données personnels du salarié en télétravail et celles traitées par ce dernier à des fins professionnelles.

C’est à l’employeur de prouver le respect du droit au repos du salarié, et ce même en télétravail (3).

Santé et sécurité au travail

Les ANI prévoient que les dispositions légales et conventionnelles relatives à la santé et sécurité sont applicables au salarié en télétravail. Toutefois, il doit être tenu compte du fait que l’employeur ne peut pas avoir une complète maitrise du lieu dans lequel s’exerce le télétravail et de l’environnement qui relève de la sphère privée.

  • Evaluation des risques professionnels : l’employeur est débiteur d’une obligation d’évaluation des risques. Cette obligation est adaptée en raison de la spécificité du télétravail et peut notamment intégrer les risques liés à l’éloignement du salarié de la communauté de travail et à la régulation de l’usage des outils numériques.
  • L’employeur informe le salarié en télétravail de la politique de l’entreprise en matière de santé et de sécurité au travail.

Même en télétravail, les salariés peuvent être sujets aux accidents du travail.

  • La présomption d’imputabilité relative aux accidents du travail s’applique en cas de télétravail.

Autrement dit, un salarié victime d’accident pendant ses heures de travail, et sur le lieu où il exerce habituellement ses activités, bénéficie de la législation protectrice desaccidents du travail.

Pour renverser la présomption, l’employeur doit prouver que ledit accident est exempt de tout caractère professionnel.

Rémunération, frais professionnels, titres-restaurant, frais de transport

Le télétravail n’affecte pas la rémunération du salarié.

Les frais engagés par le salarié dans le cadre de l’exécution de son contrat de travail doivent être supportés par l’employeur.

Des frais d’électricité, de chauffage, ou encore ceux liés à l’achat de matériel informatique rentrent sous cette catégorie.

En vertu du principe d’égalité de traitement, pour la CFDT, le salarié qui bénéficie habituellement de titres-restaurant dans son entreprise y a droit lorsqu’il télétravaille, la seule condition pour en bénéficier étant que le repas du salarié soit compris dans son horaire de travail journalier. C’est la position qui a été retenue par le Tribunal judiciaire de Paris dans un arrêt du 30 mars 2021 (n°20/09805), qui est également retenue dans le questions-réponses du Ministère du Travail « Télétravail en période de Covid-19 » mis à jour le 10/06/21.

Concernant les frais de transport, l’employeur a l’obligation de prendre en charge 50% du montrant des titres de transport de ses salariés. Toutefois, selon le questions-réponses du Ministère du Travail, lorsque le télétravail devient continu sur le mois ou la semaine, l’employeur n’est pas tenu de prendre en charge les frais de transport. Néanmoins, les employeurs sont invités à maintenir la prise en charge partielle pour les salariés titulaires d’un abonnement annuel, et n’ont pas pu résilier leur abonnement pendant la période de télétravail continu.

Formation

Les salariés en télétravail ont le même accès à la formation et aux possibilités de déroulement de carrière que s’ils effectuaient leur travail dans les locaux de l’entreprise.

Droits collectifs

Les règles collectives continuent de s’appliquer en cas de recours au télétravail, notamment celles relatives aux négociations périodiques obligatoires. De plus, les salariés ont les mêmes droits collectifs que les salariés qui travaillent dans les locaux de l’entreprise s’agissant de leurs relations avec les représentants du personnel et l’accès aux informations syndicales.

Le télétravail nécessite d’adapter les conditions du dialogue social dans l’entreprise ou dans la branche.

Des entreprises ont mis en place un local syndical numérique ou des panneaux d’affichage numérique. L’article L. 2142-6 du Code du travail permet de procéder à une communication syndicale par voie électronique. Cette communication doit résulter d’un accord d’entreprise qui en détermine les modalités. Les organisations syndicales légalement constituées depuis au moins deux ans et remplissant les conditions d’indépendance et de respect des valeurs républicaines doivent avoir accès à l’intranet de l’entreprise pour mettre à disposition des tracts ou des publications. Cette utilisation des outils numérique doit satisfaire trois conditions : 1° être compatible avec les exigences de bon fonctionnement et de sécurité du réseau informatique de l’entreprise, 2° ne pas avoir de conséquences préjudiciables à la bonne marche de l’entreprise, 3° préserver la liberté de choix des salariés d’accepter ou de refuser un message.

En outre, les réunions du CSE peuvent être impactées par le recours massif au télétravail, notamment en cas de circonstances exceptionnelles.

En principe les réunions du CSE se tiennent en présentiel (?), toutefois le recours à la visioconférence pour ces réunions peut être autorisé par accord entre l’employeur et les membres élus de la délégation du personnel du comité. En l’absence d’accord, ce recours est limité à 3 réunions par année civile (C. trav., L. 2315-4).